Le dispositif bancaire imposant à l’emprunteur de domicilier ses revenus auprès de la banque prêteuse pendant 10 ans est illégal.
La pratique consistant pour les banques à conditionner l’octroi d’un prêt immobilier à l’ouverture d’un compte bancaire par l’emprunteur et à la domiciliation de ses salaires ou revenus est encadrée par l’ordonnance du n° 2017-1090 du 1er juin 2017.
Faisant suite à cette ordonnance, le décret n° 2017-1099 du 14 juin 2017 était venu fixer la durée maximale pendant laquelle la banque prêteuse pouvait, dans le cadre d’un crédit immobilier, imposer à l’emprunteur la domiciliation de ses salaires sur un compte de paiement.
Ce délai était fixé à dix ans à partir de la conclusion du contrat de crédit, ou le cas échéant, de l’avenant au contrat de crédit initial. Cette durée ne pouvait en tout état de cause excéder celle du contrat de crédit (Code de la conso., art. R.313-21-1).
Cette disposition fixant la durée maximale pendant laquelle le prêteur pouvait imposer à l’emprunteur immobilier la domiciliation de ses salaires ou revenus assimilés sur un compte de paiement était entrée en vigueur le 1er janvier 2018 pour les offres de prêts émises à compter de cette date ainsi que les avenants modifiant ces offres.
À la suite de la publication de ce décret, l’association française des usagers de banques a déposé une demande d’annulation de celui-ci pour excès de pouvoir auprès du Conseil d’Etat. Le Conseil d’Etat avait pris la décision le 5 décembre 2018 de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l’Union européenne. Cette dernière a jugé le 15 octobre 2020 (CJUE, 15 oct. 2020, C-778/18) que la directive 2014/92/UE ne s’oppose pas à une réglementation nationale selon laquelle la durée de domiciliation imposée peut atteindre 10 ans à condition que cette domiciliation ne porte pas sur l’ensemble des revenus salariaux ou assimilés de l’emprunteur immobilier.
Le Conseil d’Etat statue le 4 février 2021 en conformité avec la décision de la CJUE et annule, comme dépourvu de base légale, le décret attaqué du 14 juin 2017, pris en application des dispositions de l’article L. 313-25-1 du Code de la consommation, qui fixait en principe à 10 ans la durée pendant laquelle le prêteur peut imposer à l’emprunteur immobilier la domiciliation de ses salaires ou revenus assimilés sur un compte de paiement.
CE, 4 févr. 2021, n° 413226