Par trois décisions prises en formation plénière, le Conseil d’Etat apporte d’importantes précisions sur le régime fiscal des « Management packages ».
Ces outils d’intéressement des cadres et dirigeants font l’objet de toute l’attention de l’administration fiscale, au point même d’être inscrits sur la carte des pratiques et montages abusifs lorsqu’ils ne sont pas « qualifiés », c’est-à-dire lorsqu’ils ne font pas l’objet d’un encadrement légal et fiscal spécifique. Tel est le cas notamment des « management packages » structurés sous forme de bons de souscription d’action (BSA) ou encore de contrat d’options d’achat d’actions (COA), qui ont donné lieu aux décisions du Conseil d’Etat du 13 juillet dernier.
La question qui se pose est alors de se savoir si l’imposition de ces « management packages » relève du régime des plus-values de cession de valeurs mobilières, ou de celui des traitements et salaires.
Si depuis la décision « Gaillochet » (CE, 26 sept. 2014, n°365573), la ligne de démarcation semblait être l’existence ou non d’un véritable risque d’investisseur, les décisions « Wendel » (CE, 12 février 2020, n°421441 et 421444), éclairées par les conclusions du rapporteur public Mme Anne Iljic, avaient dessiné une nouvelle grille d’analyse, faisant de l’existence d’un avantage financier consenti au cadre dirigeant à raison de ses fonctions la clé de la qualification.
Les trois décisions du 13 juillet dernier nous semblent s’inscrire dans ce nouveau mouvement.
En effet, le Conseil d’Etat juge que la circonstance que des options d’achat d’actions ou des bons de souscription d’actions ont été acquis ou souscrits à un prix préférentiel au regard de leur valeur réelle à la date de cette acquisition ou souscription est de nature à révéler l’existence d’un avantage. Un tel avantage, lorsqu’il trouve essentiellement sa source dans l’exercice par l’intéressé de ses fonctions de dirigeant ou salarié, a le caractère d’un avantage accordé en sus du salaire, imposable dans la catégorie des traitements et salaires, au titre de l’année d’acquisition ou de souscription des options ou des bons. Le caractère préférentiel de ce prix est en revanche sans incidence sur la nature des gains réalisés ultérieurement par le contribuable lors de l’exercice de ces options ou bons, lors de la cession des titres ainsi acquis ou lors de la cession des bons.
Par ailleurs, s’agissant des gains issus de la cession de BSA, le Conseil d’État rappelle qu’ils sont en principe imposables comme des plus-values de cession de valeurs mobilières des particuliers, y compris lorsque ces bons ont été acquis ou souscrits auprès d’une société dont le contribuable était alors dirigeant ou salarié. Cependant, le Conseil d’Etat estime qu’il en va autrement lorsque, eu égard aux conditions de réalisation du gain de cession, ce gain doit être regardé comme acquis, non à raison de la qualité d’investisseur du cédant, mais en contrepartie de ses fonctions de salarié ou de dirigeant. Il constitue alors un revenu imposable dans la catégorie des traitements et salaires. Le Conseil d’Etat précise, sur ce point, que la qualification de gain en capital imposable selon le régime des plus-values de cession de valeurs mobilières doit, en particulier, être écartée lorsque l’intéressé a bénéficié d’un mécanisme lui garantissant, dès l’origine ou ultérieurement, le prix de cession de ces bons dans des conditions constituant une contrepartie de l’exercice de ses fonctions de dirigeant ou de salarié.
Le Conseil d’État raisonne de la même façon lorsqu’un contribuable confirme une option d’achat d’actions ou exécute un BSA, estimant que le gain réalisé est alors imposable dans la catégorie des traitements et salaires lorsqu’il trouve essentiellement sa source dans l’exercice par l’intéressé de fonctions de dirigeant ou de salarié.
CE plén., 13 juill.2021, n° 428506, n°435452 et n°437498