Par un arrêt du 25 mai dernier, la Cour de cassation apporte d’importantes précisions concernant les conditions d’application du Pacte Dutreil prévu à l’article 787 B du CGI (Cass. com., 25 mai 2022, n° 19-25.513).
Pour une mise à jour de cet article voir l’article « Condition liée à l’activité pour le bénéfice de l’abattement Dutreil »
Tout d’abord, elle rappelle que les sociétés holding animatrices sont assimilées à des sociétés opérationnelles en raison de la nature même de leur activité (en ce sens déjà : Cass. com., 14 oct. 2020, n° 18-17.955 ; CE, 23 janv. 2020, n° 435562). Cette assimilation ne résulte pas d’une simple tolérance administrative, comme le laissent penser les commentaires de l’administration fiscale au Bofip (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10-20211221, n° 55).
Elle reprend ensuite la présomption qu’elle avait précédemment posée pour l’appréciation du caractère prépondérant de l’activité d’animation de groupe d’une société. Ainsi, elle confirme que le caractère principal de l’activité d’animation d’une société holding doit être retenu notamment lorsque la valeur vénale, au jour du fait générateur de l’imposition, des titres de ses filiales opérationnelles représente plus de la moitié de son actif total (en ce sens déjà : Cass. com., 14 oct. 2020, n° 18-17.955).
L’administration avait, dans un premier temps, repris intégralement cette présomption dans ses commentaires soumis à consultation publique (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10-20210406, n° 55), mais avait finalement supprimé la précision quant à la date d’appréciation de la prépondérance de l’activité d’animation (à savoir au jour du fait générateur de l’imposition) dans ses commentaires définitifs (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10-20211221, n° 55). Nous avions alors souligné que l’intention de l’administration était d’imposer que les conditions d’activité d’animation et de prépondérance de cette activité soient vérifiées pendant toute la durée des engagements collectif (ou unilatéral) et individuel (voir notamment l’article « Les nouveaux commentaires de l’administration fiscale sur le régime d’exonération Dutreil ».
Cette thèse de l’administration fiscale avait d’ailleurs été déjà accueillie par la Cour d’appel de Rennes (CA Rennes, 1re ch., 8 oct. 2019, n° 17/08339), laquelle avait considéré que la perte par la société de sa fonction d’animatrice de groupe avant l’expiration du délai légal de conservation des parts rendait la transmission de ces parts inéligibles à l’exonération partielle, faute de satisfaire aux conditions légales.
Mais, et c’est là le point important de cette décision, pour la Cour de cassation, en statuant ainsi, la Cour d’appel, qui a ajouté à la loi une condition qu’elle ne comporte pas, a violé l’article 787 B du CGI.
Ainsi, pour la Haute juridiction, dans le silence de la loi, la condition d’activité prévue par l’article 787 B du CGI doit seulement s’apprécier au jour du fait générateur de l’imposition, à savoir au moment de la transmission des titres par donation ou succession, et n’a pas nécessairement à être respectée pendant toute la durée des engagements collectif (ou unilatéral) et individuel de conservation.
Si cet arrêt est de nature à sécuriser les transmissions opérées sous Pacte Dutreil, il faut toutefois se garder, selon nous, d’un trop grand optimisme.
En effet, il est probable que l’administration fiscale se tourne vers le législateur afin de modifier la loi sur ce point lors de la prochaine loi de finances (Pour une mise à jour de cet article voir l’article « Condition liée à l’activité pour le bénéfice de l’abattement Dutreil »). Par ailleurs, l’administration fiscale tentera vraisemblablement de se tourner vers l’abus de droit fiscal pour remettre en cause la transmission des titres d’une société qui abandonnerait trop vite son activité opérationnelle ou d’animation.
Cass. com. 25 mai 2022, n° 19-25.513
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