La Cour de cassation met un terme à une controverse ancienne, en affirmant que les dettes des indivisaires à l’encontre de l’indivision sont soumises au délai de prescription de droit commun. Elle précise le point de départ du délai, qui correspond à la naissance de la créance, sans report au moment du partage.
Lorsque, comme c’est le cas en l’espèce, un indivisaire a seul remboursé les échéances d’emprunt ayant servi à l’acquisition d’un immeuble indivis, sa créance se prescrit selon les règles de droit commun édictées par l’article 2224 du Code civil (« Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer »).
Plus précisément, la Cour de cassation indique dans cet arrêt du 14 avril 2021 que « celui qui a conservé à ses frais un bien indivis peut revendiquer une créance sur l’indivision et être payé par prélèvement sur l’actif indivis, avant le partage. Cette créance, immédiatement exigible, se prescrit selon les règles de droit commun édictées par le dernier ».
On soulignera notamment que cette solution ne concerne, en aucun cas, la prescription des dettes entre époux indivisaires et partenaires pacsés qui est suspendue tant que dure l’union, en vertu des dispositions spécifiques de l’article 2236 du Code civil.
La décision de la Cour de cassation vise, au contraire, toutes les autres indivisions, légales ou conventionnelles (héritiers ou concubins notamment).
Par ailleurs, l’article 815-3 du Code civil avait déjà suscité de nombreuses controverses. Jusqu’à présent, on se demandait si une créance réclamée à l’encontre de l’indivision devait faire l’objet d’une entrée en compte, différant ainsi son exigibilité au jour de l’établissement dudit compte. Si certains textes imposent le mécanisme de l’entrée en compte, comme par exemple c’est le cas pour les récompenses, il n’existe pourtant pas de textes analogues concernant l’indivision.
A cet égard, on note que la jurisprudence majoritaire (Cour d’appel, Paris, Pôle 3, chambre 1, 20 Mars 2013 – n° 12/05150) n’admettait pas le report dans le temps de la prescription, considérant que l’indivisaire n’était pas tenu d’attendre le partage pour solliciter le paiement de sa créance.
Pourtant, certaines juridictions, comme celle de Toulouse (CA Toulouse, 21 oct. 2008, décision n° 07/04360), avaient pu accepter de différer l’exigibilité au jour de l’entrée en compte.
Dans l’arrêt du 14 avril 2021 analysé, la Cour de cassation met fin à cette controverse sur la prescription des dettes entre indivisaires.
Cass. 1er civ., 14 avril 2021, n° 19-21.313