Le légataire à titre universel peut être considéré comme un héritier au regard de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie.
Selon l’article L. 132-8 du code des assurances, le capital d’un contrat d’assurance-vie peut être payable lors du décès de l’assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés. A ce titre, est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la désignation comme bénéficiaires des héritiers ou ayants droit de l’assuré. Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires et conservent ce droit en cas de renonciation à la succession. Il est ainsi très fréquent que les contrats d’assurance-vie permettent au souscripteur, en cochant une simple case du bulletin de souscription, de désigner « mes héritiers ».
Que se passe-t-il, dès lors, lorsque le souscripteur, ayant désigné « ses héritiers » bénéficiaires du contrat, laisse à sa mort un testament désignant des légataires ? Les légataires particuliers, qui ne reçoivent qu’un bien déterminé, n’ont rien en commun avec un héritier, et ne devraient donc pas pouvoir être concernés. Mais quid d’un légataire à titre universel, appelé à recevoir une quote-part de la succession ? Leur situation ressemble en effet beaucoup à celle d’un héritier.
La Cour de cassation, amenée à se prononcer sur la question, rappelle d’abord un principe : en cas d’imprécision de la clause bénéficiaire, les juges appelés à juger de la question doivent se prononcer en fonction de la volonté du souscripteur, et précise qu’ils peuvent pour cela prendre en considération le testament, s’il en existe un. Enfin, et c’est là l’intérêt principal de sa décision, elle considère qu’un légataire à titre universel peut être identifié comme « héritier ».
Cette décision interroge : dans l’affaire jugée, le testament avait été rédigé alors que le contrat n’avait pas encore été souscrit. La souscription avait été faite par la suite, après que le souscripteur eut été placé sous tutelle, par sa tutrice.
Difficile, dès lors, de considérer que le testament pouvait contenir la volonté du testateur quant à un contrat qui n’existait pas, et qui serait souscrit alors que, placé sous tutelle, on peut douter qu’il ait encore pu exprimer une volonté.
On ne saurait que trop recommander, en matière d’assurance-vie, de procéder à la désignation des bénéficiaires, non pas dans le bulletin de souscription, mais par un testament rédigé avec le conseil d’un notaire.
Cass. 1re civ., 20 sept. 2020, n° 19-11.187