Pleine propriété ou nue-propriété, don manuel ou acte notarié, une fois la forme du don établie, il faut en envisager les modalités.
Donation-partage
S’il paraît logique d’aider ses enfants au moment où ils en ont besoin, ces gestes désintéressés réalisés individuellement peuvent avoir des effets pervers.
Ce sera le cas si la valorisation des biens donnés ou acquis avec les sommes données évolue différemment et que, lors de l’ouverture de la succession du donateur, de grandes disparités se font jour. L’encadré page 4 décrit les problèmes potentiels posés lors du calcul de la réserve héréditaire.
• Le double intérêt de la donation-partage
1. Elle permet aux parents de préparer la répartition de leur patrimoine en toute clarté et de rassembler leurs enfants autour de leur projet. Rappelons qu’une donation doit être acceptée : il importe donc que tous les enfants partagent les vues de leurs parents.
2. Elle « gèle » les valeurs données à leur valeur déclarée au jour de l’acte.
Pour produire ces effets, elle doit :
- concerner a priori tous les enfants du donateur, ce qui signifie que si, par la suite, le donateur avait un nouvel enfant, il faudrait refaire un nouvel acte pour y associer le dernier-né.
À noter : une donation-partage peut aussi, avec l’accord des enfants, impliquer les petits enfants du donateur.
- répartir des biens « entiers », distincts : c’est ce qui résulte de décisions récentes de la Cour de cassation. Pas question par exemple, d’attribuer des parts indivises d’un bien immobilier.
Une donation-partage qui attribuerait des biens indivis entre les donataires risquerait d’être requalifiée en donation simple. Le cas échéant, il faut remodeler les transmissions déjà opérées si l’on veut cristalliser leurs effets. La réintégration de ces donations dans une donation-partage de biens distincts est une solution.
• Réincorporation de donations simples. Il est en effet possible de réintégrer une ou plusieurs donations déjà réalisées dans une donation-partage. Votre notaire vous conseillera sur la meilleure manière de procéder à ce partage, qu’il s’agisse de rassembler les donations de sommes d’argent effectuées lorsque leurs enfants en avaient besoin, de « faire les comptes », d’égaliser les avances faites à des époques distinctes, ou de réinstaller une donation-partage indivise dans un cadre stable.
• Allotir ensemble des enfants. Les époux peuvent, sous réserve d’avoir au moins deux enfants communs, faire ensemble une donation-partage au profit de ces derniers. L’avantage de cette donation-partage dite « conjonctive » est sa souplesse : elle peut porter sur des biens communs et des biens propres sans considération de leur origine. Par exemple, si chaque parent ne dispose que d’une maison en propre, ils ne pourraient donner que la moitié indivise à chacun de leurs enfants (ce n’est pas un partage). La donation-partage conjonctive est la solution : chaque enfant recevra une maison, censée être donnée par les deux parents.
Dans les familles recomposées, il est possible d’associer ses propres enfants et ceux que son conjoint a eus d’une union précédente. Mais en aucun cas, les beaux-enfants ne peuvent recevoir par ce biais un bien propre de leur beau-parent : il n’est possible de leur attribuer qu’un bien commun.
Donation avec charge
L’acte de donation met des obligations à la charge du donataire comme par exemple s’occuper du donateur ou verser une soulte à un autre enfant. Pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit, la valeur du bien donné est alors réduite pour tenir compte de la charge imposée au donataire. De nombreux contentieux ont prospéré lorsque le fisc apportait la preuve que la charge était fictive.
Si le donataire n’exécute pas les charges prévues, la donation peut être révoquée.
À noter : toute donation peut être aussi révoquée si le donataire fait preuve « d’ingratitude » à l’égard du donateur ou si ce dernier a un enfant alors qu’il n’en avait pas au moment de la donation.
Donation graduelle ou résiduelle
Ce sont des donations « par étapes » : l’acte de donation prévoit que le donataire devra transmettre le bien donné à un tiers après son propre décès.
• Donation « graduelle » : le donataire aura l’obligation de conserver le bien jusqu’à son décès (il ne peut pas le vendre même s’il voulait le remplacer par un autre. Seule exception : les valeurs au sein d’un portefeuille).
Par exemple : le donateur donne un studio à son enfant à charge pour lui de le transmettre à son décès à son neveu (le fils d’un autre enfant du donateur). Une donation graduelle ne peut porter que sur la quotité disponible du donateur. Mais les héritiers réservataires peuvent accepter qu’elle concerne aussi leur part de réserve.
• Donation « résiduelle » . Le donataire transmettra le jour de son décès au bénéficiaire désigné ce qu’il aura conservé de la donation. Il peut vendre ou donner les biens reçus. Il ne pourra les léguer que pour la part qui empiète sur sa réserve.
Par exemple : le donateur donne un portefeuille de valeurs mobilières à son enfant pour qu’il le gère (achat, vente de titres, etc.), à charge pour lui de le transmettre à son enfant (le petit-fils du donateur).
Donation en avance ou hors part
On gagne toujours à préciser le sens que l’on donne à sa générosité et à indiquer de quelle manière l’on souhaite que cette donation soit réalisée. À défaut la donation est présumée faite en avance de part successorale quand elle est consentie à un héritier réservataire.
• « En avancement de part successorale » : elle constitue une avance sur la part de réserve du donataire. Il devra la rapporter à la masse à partager pour respecter l’égalité entre les héritiers.
• « Hors part successorale » : elle entame la quotité disponible du donateur (lire l’encadré en bas de cette page) et constitue un « plus » pour l’héritier réservataire.
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