Le vendeur d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) est tenu à une obligation d’information de l’acheteur au titre de l’article L. 514-20 du Code de l’environnement.
Que dit la loi ?
Cette obligation n’est pas récente puisqu’elle résulte de l’article 6 de la loi n° 92-646 du 13 juillet 1992 relative à l’élimination des déchets ainsi qu’aux installations classées pour la protection de l’environnement.
Elle est aujourd’hui codifiée à l’article L 514-20 du Code de l’environnement, lequel dispose :
« Lorsqu’une installation soumise à autorisation ou à enregistrement a été exploitée sur un terrain, le vendeur de ce terrain est tenu d’en informer par écrit l’acheteur ; il l’informe également, pour autant qu’il les connaisse, des dangers ou inconvénients importants qui résultent de l’exploitation.
Si le vendeur est l’exploitant de l’installation, il indique également par écrit à l’acheteur si son activité a entraîné la manipulation ou le stockage de substances chimiques ou radioactives. L’acte de vente atteste de l’accomplissement de cette formalité.
A défaut, et si une pollution constatée rend le terrain impropre à la destination précisée dans le contrat, dans un délai de deux ans à compter de la découverte de la pollution, l’acheteur a le choix de demander la résolution de la vente ou de se faire restituer une partie du prix ; il peut aussi demander la réhabilitation du site aux frais du vendeur, lorsque le coût de cette réhabilitation ne paraît pas disproportionné par rapport au prix de vente. »
Qu’est-ce qu’une installation classée pour la protection de l’environnement ?
Les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) concernent des installations pouvant présenter des impacts (pollution de l’eau, de l’air, des sols, …) et des dangers (incendie, explosion, …) sur l’environnement. Leur définition légale est donnée à l’article L. 511-1 du Code de l’environnement.
Il peut s’agir notamment d’usines, d’une installation Seveso, d’ateliers, de dépôts, de chantiers, d’exploitations de carrières, de stockage de déchets… et en matière agricole, de silos et installations de stockage en vrac, de dépôts de fumier et d’engrais, d’un parc éolien…
Pour ces raisons, elles sont soumises à des réglementations spécifiques, reposant essentiellement sur 3 régimes distincts, selon l’importance des dangers et inconvénients liés à ces installations :
- L’autorisation, applicable aux installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients ;
- L’enregistrement (forme d’autorisation simplifiée), concernant des installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves mais qui peuvent, en principe, être prévenus grâce au respect de certaines prescriptions ;
- Et la déclaration, relative à des installations qui ne présentant pas de graves dangers ou inconvénients mais qui doivent néanmoins respecter des prescriptions générales.
Quelles sont les installations classées visées au titre de l’obligation d’information du vendeur ?
Le texte vise uniquement des terrains (bâtis ou non) ayant supporté une installation soumise à autorisation ou à enregistrement, dont l’exploitation a cessé.
Conseil du Notaire
Bien que le texte ne vise pas les ICPE soumises à déclaration ainsi que les ICPE dont l’exploitation est en cours au moment de la vente, nous ne pouvons que conseiller au vendeur, au titre de son obligation générale d’information précontractuelle (article 1112-1 du Code civil), de fournir à l’acquéreur les mêmes renseignements pour ce type d’installations.
Précision étant ici faîte qu’au titre de la vente de terrain supportant certaines installations classées soumises à garantie financière (installation Seveso, carrière, installation de stockage de déchets, …), dont l’exploitation est en cours au moment de la vente, l’article L 512-18 du Code de l’environnement impose d’annexer à toute promesse unilatérale de vente ou d’achat et à tout acte de vente le dernier état réalisé au titre de la pollution des sols. |
Quelles sont les informations à fournir par le vendeur ?
La loi prévoit trois types d’informations.
L’existence passée d’une ICPE
Le vendeur, professionnel ou non, exploitant ou non, ne peut se soustraire à cette obligation d’information.
Il a l’obligation de se renseigner pour valablement informer son acquéreur.
Il s’agit là d’une obligation de résultat, la légitime ignorance du vendeur ne l’exonérant pas vis-à-vis de l’acquéreur.
Conseil du Notaire
Pour remplir son obligation, il sera nécessaire au vendeur de réaliser une étude historique et documentaire en effectuant les recherches suivantes :
– Analyse des anciens titres de propriété (en ne se limitant pas à l’origine de propriété immédiate).
– Demande écrite auprès de la Préfecture du Département ou de la Direction Régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL).
– Consultation du site internet d’information sur les installations classées : https://www.georisques.gouv.fr/risques/installations/donnees?page=1
– Consultation des autres bases de données crées à l’initiative du Ministère de l’Ecologie :
– Base de recherche des informations de l’administration concernant une pollution suspectée ou avérée (ex-BASOL) : https://www.georisques.gouv.fr/risques/sites-et-sols-pollues/donnees#/type=instructions
– Carte des anciens sites industriels et activités de service (ex-BASIAS) : https://www.georisques.gouv.fr/risques/basias/donnees#/
– Consultation de la bibliothèque en ligne des cartes et photographies de l’IGN (Institut national de l’information géographique et forestière) : https://remonterletemps.ign.fr/
En fonction de circonstances particulières, notamment lorsque l’acquéreur envisage un changement de destination pour passer d’un usage industriel à de l’habitation, il y aura lieu de se montrer particulièrement vigilant, en faisant réaliser une étude historique par un bureau d’étude spécialisé. |
Les dangers ou inconvénients importants qui résultent de l’exploitation de l’installation
Pour autant qu’il les connaisse, le vendeur, exploitant ou non, doit en informer l’acquéreur.
Il s’agit d’une obligation de moyens. Si le vendeur d’un terrain a, nous l’avons vu, une obligation de recherche quant à la révélation de l’existence passée d’une installation classée, il n’en a pas quant à l’information sur d’éventuels dangers ou inconvénients importants.
Cette obligation sera appréciée de manière plus sévère si le vendeur est lui-même l’exploitant de l’installation à l’origine de la pollution ou encore s’il a la qualité de vendeur professionnel.
En cas d’existence d’une ancienne ICPE, il y a lieu de constituer un dossier spécifique à l’intention de l’acquéreur, regroupant tous les éléments pouvant être réunis au titre des formalités d’autorisation et d’enregistrement de l’ICPE ainsi que de la cessation d’activité (diagnostic environnemental, plan de gestion et/ou d’interprétation de l’état des milieux).
Conseil du Notaire
Afin de valablement remplir son obligation et éviter tout risque de contestation, il peut paraître opportun que le vendeur, qu’il ait la qualité de dernier exploitant ou non, fasse réaliser un diagnostic environnemental du terrain par un bureau d’études en vue d’identifier les éventuels dangers et/ou inconvénients résultant de l’exploitation passée. |
La manipulation ou le stockage de substances chimiques ou radioactives
Le vendeur non exploitant n’est pas tenu par cette troisième obligation.
Le cas échéant, ces trois informations devront être complétées lorsque le terrain est situé dans un secteur d’information sur les sols, arrêté par le Préfet conformément à l’article L 125-6 du Code de l’environnement (concernant les terrains où la connaissance de la pollution des sols justifie, notamment en cas de changement d’usage, la réalisation d’études de sols et de mesures de gestion de la pollution pour préserver la sécurité, la santé ou la salubrité publiques et l’environnement).
Dans une telle hypothèse, le vendeur sera alors tenu d’en informer par écrit, dans le contrat de vente, qui atteste de cette formalité, de l’intégration éventuelle du terrain concerné dans un secteur et lui communiquer les informations rendues publiques par l’Etat, et notamment la fiche du secteur d’information sur les sols concerné que l’Etat aura publié sur le site Géorisques.
Les sanctions attachées à cette dernière obligation sont les mêmes que celles visées à l’article L. 514-20 du Code de l’environnement (cf. infra).
Quelle forme doit prendre cette information ?
Le vendeur est tenu d’informer l’acheteur par écrit.
Cette information doit être préalable à tout engagement de l’acquéreur.
Conseil du Notaire
L’envoi d’un courrier préalable à la signature de l’avant-contrat de vente (promesse de vente ou d’achat) sera à privilégier. |
L’acte de vente de vente devra contenir la mention de l’accomplissement de cette formalité.
Quelles sont les sanctions applicables en cas de manquement du vendeur à cette obligation d’information ?
Une action est ouverte au profit de l’acquéreur à l’encontre du vendeur si les deux conditions suivantes sont cumulativement remplies :
- Si le vendeur n’a pas respecté son obligation d’information telle que décrite ci-dessus ;
- Et si une pollution constatée rend le terrain impropre à la destination précisée dans le contrat de vente.
L’acquéreur aura alors le choix entre demander la résolution de la vente, demander une réduction du prix, ou exiger la remise en état du site à la charge du vendeur (uniquement lorsque le coût de cette réhabilitation ne paraît pas disproportionné par rapport au prix de vente).
L’exercice de cette action est encadré dans le délai de deux ans à compter de la découverte de la pollution.
Jean-Jacques PEREZ
Notaire à Montpellier