Le ministère de la justice se montre favorable au renforcement du principe de liberté des conventions matrimoniales, sans toutefois qu’une réforme du droit des régime matrimoniaux soit envisagée dans l’immédiat.
Le régime matrimonial de participation aux acquêts est un régime parfois adopté par les chefs d’entreprises, qui y voient un intérêt : celui d’éviter l’ingérence de leur conjoint dans la gestion de leurs biens personnels, tout en assurant ce dernier de « participer » , à terme, à leur enrichissement. Cette participation prend la forme d’une créance de participation, calculée au moment de la liquidation du régime, et qui correspond peu ou prou à la différence entre la valeur du patrimoine au jour de la dissolution du régime, et celle du patrimoine au jour du mariage.
Une clause s’est toutefois développée dans les contrats de mariage des chefs d’entreprises ayant décidé de soumettre leur union au régime de la participation aux acquêts : la clause d’exclusion des biens professionnels en cas de dissolution du mariage pour une cause autre que le décès. En application de cette clause, et dans l’hypothèse d’un divorce, les biens professionnels sont exclus du calcul de la créance de participation. L’une des motivations souvent avancée par les praticiens était la suivante : l’insertion des biens professionnels dans le calcul de la créance de participation a pour effet, lorsque le patrimoine professionnel est fortement évalué, d’augmenter sa valeur. Or, le conjoint entrepreneur ne dispose pas toujours des liquidités lui permettant de désintéresser son conjoint à cette hauteur.
Il n’en reste pas moins que cette clause constitue, ainsi qu’en a décidé la Cour de cassation, un avantage matrimonial (sur cette question, voir l’arrêt récent : Cass. 1re civ. 18 décembre 2019, n° 18-26.337). Or, ceux-ci sont révoqués de plein droit par le divorce (Code civil, art. 265, al.2).
La combinaison de cette jurisprudence et de l’article 265 du code civil conduit en somme à réduire drastiquement la possibilité pour l’entrepreneur marié sous le régime de la participation d’aménager son régime. Ainsi qu’en a conclu un parlementaire, dans une question posée au garde des Sceaux : « cette décision conduit à interdire de fait tout aménagement de ce régime en cas de divorce, allant à l’encontre de la liberté contractuelle sans raison apparente, si ce n’est une rédaction défaillante de l’article 265 du code civil. Elle aura pour conséquence une diminution drastique du recours à la participation aux acquêts au profit de régimes moins protecteurs du survivant, notamment la séparation de biens ».
Et le ministère de la Justice de se montrer, dans sa réponse, favorable à une clarification de l’article 265 alinéa 2 afin de favoriser la prévisibilité juridique et de renforcer le principe de liberté des conventions matrimoniales, en précisant toutefois qu’une réforme du droit des régimes matrimoniaux n’était pas envisagée dans l’immédiat.
Rép. min. n° 14362, JO Sénat 28 mai 2020