Nombreux sont désormais les retraités français à avoir franchi les Pyrénées. Le Portugal a beaucoup d’attraits parmi lesquels son climat doux, ses plages, un pouvoir d’achat et surtout un régime fiscal favorables.
Qu’en est-il en matière de droits de succession ?
Il faut distinguer le cas de ces Français, nouveaux résidents du Portugal, de celui des Portugais résidents en France. En effet, les flux migratoires n’ont pas toujours été orientés dans le même sens.
Dans le cas d’un résident fiscal du Portugal, quelle que soit sa nationalité, la solution diffère selon les deux paramètres suivants : l’Etat du lieu de situation des biens du défunt et le pays de résidence des héritiers.
S’il est vrai que les héritiers résidant au Portugal ne seront pas imposés par l’Etat portugais sur les biens situés au Portugal, a contrario, en vertu de l’article 750 ter 3° du Code général des impôts français, un héritier résident fiscal de France sera imposé en France sur la quote-part des biens, situés tant au Portugal qu’en France. Cet article est applicable dès lors que l’héritier est résident français au jour du décès et l’a été au moins six ans au cours des dix dernières années.
La solution est nuancée lorsque le défunt laisse des biens dans les deux pays, puisque, alors, l’héritier résident portugais sera imposé par la France sur la quote-part des biens lui revenant situés en France.
Face à une situation aussi complexe, une solution s’impose. Pour alléger, voire supprimer, les droits de succession dus en France, il faut impérativement anticiper la succession. Les parents peuvent donner à leurs enfants – de préférence en nue-propriété – d’abord les biens situés en France puis les biens situés au Portugal. Le notaire de France peut enregistrer les donations de biens dans les deux pays pour éviter que l’administration fiscale n’exige des droits de succession au jour du décès. Où qu’il réside, chaque enfant bénéficie de l’abattement de 100.000 euros de chacun de ses parents, renouvelable tous les quinze ans.
Cas d’un résident fiscal en France
Dans le cas d’un résident fiscal de France, la totalité de ses biens tant en France qu’au Portugal sera imposée par la France quel que soit l’Etat de résidence des héritiers. Cette règle vaut par exemple pour les nombreux Portugais résidant en France qui disposent au Portugal d’une résidence secondaire ou de biens de famille.
Le développement de la coopération fiscale, au sein de l’Union européenne et entre Etats de l’OCDE, rend chaque jour plus risquée la dissimulation de biens dans la déclaration de succession par les héritiers. L’épée de Damoclès de la rectification fiscale, accompagnée des pénalités et intérêts de retard, pèse sur leur tête pendant dix ans à compter de la date du décès.
Exemple
Pour exemple, M. Dupont, père de deux enfants, décède à Porto, où il résidait avec sa fille, son fils étant, lui, domicilié à Paris. Il possédait sa résidence principale portugaise, d’une valeur de 2.000.000 euros, et un compte bancaire de 400.000 euros en France. Le Portugal exonère la succession, mais les enfants restent redevables en France de droits de succession sur 200.000 euros – la moitié du compte bancaire – pour la fille et sur 1.200.000 euros – la moitié du compte bancaire et de la résidence principale – pour le fils.
Ces écueils, trop souvent méconnus pour être prévenus à temps, ne sont pas l’apanage des droits de succession, mais existent tout autant en matière d’ISF ou d’impôt sur le revenu. Afin d’éviter les déconvenues, consultez votre notaire.
Olivier Lecomte
Notaire à Carrières-sur-Seine, et Guillaume Cicéron, collaborateur à Carrières-sur-Seine
Article paru dans Les Echos, le 13 mai 2016
Lire l’article sur le site www.lesechos.fr