Il est tout à fait possible pour un mineur, sous certaines réserves, d’être associé ou actionnaire d’une société. Cela étant, notamment, pour permettre d’anticiper une transmission du patrimoine en dissociant la propriété du pouvoir. Compte tenu de sa vulnérabilité, cette situation impose des contraintes spécifiques.
Le principe est que l’administrateur légal représente le mineur dans tous les actes de la vie civile, sauf les cas dans lesquels la loi ou l’usage autorise les mineurs à agir eux-mêmes.
Hier comme aujourd’hui, l’accès du mineur à une société reste réglementé. Certaines formes sociétaires sont en effet interdites au mineur, le législateur s’attachant à prohiber l’exercice au nom du mineur du commerce et d’une profession libérale. Ainsi, il ne peut être associé d’une société en nom collectif. Il existe cependant des formes sociétaires d’exercice de l’activité professionnelle libérale qui sont ouvertes au mineur. Tel est le cas des SEL qui accueillent aux côtés des professionnels en exercice dans la société d’autres associés, dont les héritiers de certains associés.
Le mineur a la possibilité d’entrer dans une société en faisant un apport ou en se portant acquéreur des droits sociaux, que ce soit à titre gratuit ou onéreux. Les autorisations requises varient en fonction de la nature du bien apporté, du fait que la société soit personnelle ou unipersonnelle, ainsi que de son âge (plus ou moins de 16 ans). Il conviendra d’obtenir, selon les circonstances, l’accord du juge des tutelles, ou de l’un ou des deux parents. Une fois associé, le mineur dispose de prérogatives politiques. Elles résident dans l’exercice de son droit de participer aux décisions collectives et de voter. L’exercice du droit de vote sera qualifié d’acte de disposition ou d’acte d’administration en fonction des points prévus à l’ordre du jour, supposant ainsi l’intervention de l’un ou des deux parents.
La participation du mineur à une société peut, au-delà de présenter des lourdeurs juridiques pouvant faire courir un risque sur la validité des assemblées générales, présenter un danger pour ce dernier, notamment dans les sociétés dont la responsabilité des associés est indéfinie. Ainsi, en cas de souscription d’un emprunt bancaire par une société civile immobilière, le mineur associé sera indéfiniment responsable du prêt à hauteur de sa participation dans le capital. Il conviendra ainsi, impérativement, que le professionnel obtienne du banquier, comme des autres associés, une renonciation à poursuivre le mineur, pour tout passif souscrit par la société, tant pendant sa minorité que pendant sa majorité.
Bien que très théorique, car certainement très risqué, une autre question réside dans le fait de savoir si un mineur peut exercer un mandat social. Aussi surprenant que cela puisse paraître, aucune capacité juridique particulière n’est requise pour être dirigeant d’une société. Ainsi, un mineur semble pouvoir diriger une société. Quel que soit le droit positif, il semble peu raisonnable de nommer un mineur comme dirigeant d’une société. Mais, si tel devait être le cas, il conviendrait nécessairement de s’interroger sur sa responsabilité dans ses fonctions sociales. En effet, en acceptant un tel mandat, au-delà du risque qui pèse sur lui en sa qualité d’associé, le mineur pourrait voir sa responsabilité civile, pénale et fiscale engagée en sa qualité de dirigeant.
N’hésitez pas à vous rapprocher de votre conseil afin d’envisager une telle opération, qui, bien que pouvant présenter un intérêt, n’en est pas moins risquée.
Nicolas Dupouy
Notaire à Juillan, membre du Groupe Monassier
Article paru dans Les Echos le 21 avril 2017
Lire l’article sur le site www.lesechos.fr