Lorsque l’usufruitier conserve la faculté de remployer ou non le produit de la cession des titres dont il a l’usufruit, il reste intégralement redevable de l’imposition des plus-values résultant de la cession.
Un arrêt du Conseil d’Etat du 2 avril 2021 incite à revoir la rédaction de certaines clauses, insérées dans les actes de donations en démembrement, relatives au devenir du prix de cession en cas de cession conjointe par le nu-propriétaire et l’usufruitier.
Civilement, on le sait, l’article 621 du Code civil dispose qu’en cas de vente simultanée de l’usufruit et de la nue-propriété d’un bien, le prix se répartit entre l’usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits, sauf accord des parties pour reporter l’usufruit sur le prix. Bien que cela ne soit pas précisé dans ce texte légal, il est également admis que les parties puissent remployer le prix dans l’acquisition d’un autre bien en démembrement de propriété par le jeu de la subrogation réelle conventionnelle.
Fiscalement, le sort du prix de cession aura une incidence sur la détermination du redevable de l’impôt de plus-value. Les règles en la matière ont été précisées par l’administration fiscale (une distinction étant faite selon que la propriété des titres a été démembrée avant ou à partir du 3 juillet 2001).
Dans un arrêt du 2 avril dernier, le Conseil d’Etat reprend les principes dégagés par l’administration fiscale au Bofip et rappelle ainsi que l’imposition de la plus-value constatée à la suite des opérations par lesquelles l’usufruitier et le nu-propriétaire de titres sociaux dont la propriété est démembrée procèdent ensemble à leur cession, se répartit en principe entre l’usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits.
Toutefois, lorsque les parties ont décidé, par les clauses contractuelles en vigueur à la date de la cession, que le droit d’usufruit serait, à la suite de la cession, reporté sur le prix issu de celle-ci, la plus-value est alors intégralement imposée entre les mains de l’usufruitier.
Lorsque, en revanche, les parties ont décidé que le prix de cession sera nécessairement remployé dans l’acquisition d’autres titres dont les revenus reviennent à l’usufruitier, la plus-value réalisée n’est imposable qu’au nom du nu-propriétaire.
Cependant, et c’est là la nouveauté, la Haute juridiction administrative précise que « lorsque l’usufruitier conserve la faculté de remployer ou non le produit de la cession des titres dont il a l’usufruit, le droit d’usufruit doit être regardé, pour l’imposition des plus-values résultant de la cession, comme reporté sur le produit de cette cession, rendant ainsi l’usufruitier intégralement redevable de l’imposition ». Dès lors, la seule présence d’une clause de remploi n’est pas suffisante pour rendre le nu-propriétaire redevable de l’impôt sur la plus-value, encore faut-il que ce remploi soit obligatoire.
CE, 2 avr. 2021, n°429187