Pour le Conseil d’Etat l’existence d’un bail commercial ne s’oppose pas à l’application de la théorie de la domanialité publique par anticipation.
Le Conseil d’Etat réaffirme ainsi que lorsqu’une personne publique a pris la décision d’affecter un bien qui lui appartient à un service public et que l’aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public peut être regardé comme entrepris de façon certaine, eu égard à l’ensemble des circonstances de droit et de fait, telles que, notamment, les actes administratifs intervenus, les contrats conclus, les travaux engagés, ce bien doit être regardé comme une dépendance du domaine public (en ce sens déjà, CE, 13 avr. 2016, n° 391431 ; CE, 22 mai 2019, n° 423230).
Mais, le Conseil d’Etat ajoute, et c’est l’un des principaux apports de cet arrêt, qu’il en va de même lorsque la personne publique décide d’affecter à un service public un bien lui appartenant et qui est déjà doté des aménagements indispensables à l’exécution des missions de ce service public, alors même qu’un droit d’occupation de ce bien serait, à la date de cette décision d’affectation, conféré à un tiers par voie contractuelle.
Ainsi, l’existence d’un bail commercial ne s’oppose pas à l’application de la théorie de la domanialité publique par anticipation et donc à l’incorporation du bien qui en est l’objet dans le domaine public.
On soulignera que le Conseil d’Etat prend soin de préciser le devenir d’un tel bail dans cette hypothèse particulière. Pour la Haute juridiction administrative, si le bail commercial, en cours à cette date, ne peut plus être opposé à la commune en celles de ses clauses devenues incompatibles avec l’appartenance des parcelles en cause au domaine public, il constitue néanmoins, tant que la commune n’y a pas mis fin, un titre autorisant son titulaire à occuper la dépendance en litige.
CE, 21 déc. 2022, n° 464505