Comme chaque année les notaires du Groupe Monassier sont amenés à se pencher sur les lois de finances fraîchement publiées afin de conseiller au mieux leurs clients. En 2018, les changements sont d’importance : mise en place d’une Flat tax sur les revenus du capital, d’un nouvel abattement exceptionnel sur les plus-values immobilières, d’un remplacement de l’ISF par l’IFI…
Les principales dispositions qui ont retenu notre attention sont exposées ci-dessous.
Fiscalité des particuliers et du patrimoine
Prorogation et recentrage du dispositif « Pinel »
Le dispositif Pinel est prolongé pour 4 ans et s’appliquera aux investissements réalisés jusqu’au 31 décembre 2021.
Cependant, son application est recentrée sur les seules communes classées dans les zones A, A bis et B1 du territoire.
Cette modification s’applique aux acquisitions réalisées à compter du 1er janvier 2018 et, s’agissant des logements que le contribuable fait construire, aux constructions pour lesquelles une demande de permis de construire a été déposée à compter de la même date.
Les communes appartenant aux zones B2 et C ne sont donc plus éligibles au dispositif à compter du 1er janvier 2018.
Toutefois, à titre transitoire, le dispositif Pinel continuera à s’appliquer dans les zones B2 et C aux acquisitions de logements ayant fait l’objet d’un dépôt de demande de permis de construire au plus tard le 31 décembre 2017 ET à la condition que cette acquisition soit réalisée au plus tard le 31 décembre 2018.
Le dispositif est par ailleurs étendu aux logements situés dans des communes dont le territoire est couvert par un contrat de redynamisation de sites de défense, quelle que soit la zone géographique dans laquelle la commune est classée (A, A bis, B1, B2 ou C).
Substitution de l’IFI à l’ISF
A compter du 1er janvier 2018, l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) est remplacé par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI).
Ce nouvel impôt, codifié aux articles 964 à 983 du CGI, emprunte de nombreux éléments à l’ISF : définition des redevables, date du fait générateur (1er janvier de l’année d’imposition), seuil de déclenchement (1.300.000 €), barème de taxation, etc.
Toutefois, l’IFI est bel et bien différent de son prédécesseur et dispose d’un régime propre qu’il est impératif de maîtriser rapidement.
L’IFI a ainsi pour vocation de ne cibler que le patrimoine immobilier du contribuable, qu’il soit détenu directement ou indirectement au travers de société. Dans ce dernier cas, seule la fraction de la valeur représentative des biens immobiliers détenus directement ou indirectement par la société (sans limitation du nombre de niveau d’interposition) est alors prise en compte dans l’assiette imposable à l’IFI. De nombreuses exclusions sont néanmoins prévues pour la détermination de ce ratio (exclusion de l’immobilier affecté à l’activité opérationnelle d’une société, exclusion des participations de moins de 10 % dans des sociétés opérationnelles, etc.). Pour tenir compte des difficultés pratiques de détermination de cette fraction, une clause de sauvegarde pour les redevables de bonne foi a été adoptée. Ainsi, aucun rehaussement ne sera effectué si le redevable, de bonne foi, démontre qu’il n’était pas en mesure de disposer des informations nécessaires à l’estimation de la fraction de la valeur des parts ou actions représentative de l’immobilier indirectement détenu.
Des exonérations sous conditions ont également été prévues afin d’épargner certains actifs immobiliers : bois et forêts, biens ruraux donnés à bail à long terme ou à bail cessible, actifs immobiliers affectés à l’activité professionnelle, etc.
Les exonérations partielles des titres faisant l’objet d’un Pacte Dutreil ou détenus par les salariés et les mandataires sociaux, qui étaient applicables en matière d’ISF, n’ont quant à elles, pas été reprises pour l’IFI.
Autre point d’attention, les règles d’évaluation et de déduction du passif qui font l’objet de nombreux dispositifs anti-abus. Les contestations et les contentieux seront vraisemblablement nombreux en la matière.
Pour la valorisation des parts ou actions imposables, ne seront par exemple pas prises en compte les dettes contractées directement ou indirectement par la société pour l’acquisition d’un bien imposable à un redevable ou un membre de son foyer fiscal qui contrôle, seul ou conjointement avec son foyer fiscal, la société. Sauf si le redevable justifie que le prêt n’a pas été contracté dans un objectif principalement fiscal.
S’agissant du passif, certains prêts ne seront pas déductibles à moins que le redevable ne justifie du caractère normal des conditions du prêt. Sont notamment concernés les prêts contractés auprès du foyer fiscal au sens de l’IFI, du groupe familial élargi, ou d’une société contrôlée directement ou indirectement par l’un des membres du groupe familial.
Toujours sur ce point, il faut noter qu’un plafond de déduction est mis en place pour les gros patrimoines. Ainsi lorsque la valeur vénale du patrimoine taxable est supérieure à 5 millions d’euros, et que le montant total des dettes déductibles excède 60 % de cette valeur, le montant des dettes dépassant ce seuil n’est déductible qu’à hauteur de 50 % de cet excédent.
Enfin, il faut relever que les obligations déclaratives sont unifiées. L’ensemble des redevables devra donc déclarer son patrimoine taxable au sein de la déclaration sur le revenu n°2042.
N.B. : Même si l’ISF est supprimé, les contribuables ayant bénéficié d’une exonération sous réserve d’un engagement de conservation devront continuer à respecter cet engagement. Tel est notamment le cas des redevables ayant souscrit un Pacte Dutreil.
Prélèvement forfaitaire unique ou « flat tax »
Le prélèvement forfaitaire unique (PFU), appelé « flat tax », consiste en principe en une imposition à l’IR au taux forfaitaire unique de 12,8 % des principaux revenus du capital (RCM, plus-values mobilières, etc.).
Compte-tenu des prélèvements sociaux au taux de 17,2 %, l’imposition globale en résultant s’élève à 30 %.
Les contribuables peuvent toutefois opter pour une imposition selon le barème progressif de l’IR. Cette option est expresse et irrévocable. Elle doit être formulée avant l’expiration de la date limite de souscription de la déclaration d’ensemble de revenus de l’année de réalisation ou de perception des revenus concernés. Etant globale, cette option concerne donc l’ensemble des revenus et plus-values de l’année.
Il conviendra donc d’effectuer des simulations afin d’opter pour la solution la plus avantageuse, en tenant compte notamment des différences d’assiette pouvant exister entre le PFU et l’imposition au barème de l’IR, et de l’impact de la CSG déductible.
Les plus-values immobilières, les revenus fonciers ou encore les revenus professionnels (BIC, BA, BNC) ne sont pas concernés par la « flat tax ».
Dividendes et revenus distribués
Sont notamment concernés les produits des actions et des parts sociales et revenus assimilés, et d’une manière générale, l’ensemble des revenus distribués (ex : jetons de présence).
Le prélèvement forfaitaire obligatoire (PFO), non libératoire de l’IR, est maintenu. Toutefois, le taux du PFO est ramené à 12,8 % (contre 21 % précédemment).
Sauf cas particuliers ou option globale pour l’imposition au barème progressif, les revenus distribués sont soumis, en année N+1, au PFU au taux forfaitaire de 12,8 %, après imputation du PFO opéré à la source en année N.
Le PFU est assis sur le montant brut des revenus, sans tenir compte de l’abattement de 40 %, ni des dépenses engagées pour l’acquisition ou la conservation de ces revenus (contrairement à l’imposition au barème de l’IR).
Intérêts
Sont concernés, sauf cas particuliers, l’ensemble des produits de placement à revenu fixe (revenus d’obligations, de créances, de dépôts et de cautionnement, d’obligations négociables, etc.).
Les intérêts et revenus exonérés (notamment livret A, LDD) ne sont pas concernés par le PFU.
Les intérêts des PEL et CEL ouverts à compter du 1er janvier 2018 sont soumis au PFO et au PFU.
Comme pour les revenus distribués, le PFO est maintenu avec un taux ramené à 12,8 % (contre 24 % précédemment).
Sauf cas particuliers ou option globale pour l’imposition au barème progressif, les produits de placements à revenu fixe sont soumis, en année N+1, au PFU au taux forfaitaire de 12,8 %, après imputation du PFO opéré à la source en année N.
Le PFU est assis sur le montant brut des revenus.
Plus-values de cessions de valeurs mobilières
Les gains nets de cession de valeurs mobilières mentionnés aux articles 150-0 A et suivants du CGI, réalisés par les particuliers dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé, sont soumis au PFU au taux de 12,8 %, sauf option globale pour l’imposition au barème progressif.
Compte-tenu des prélèvements sociaux de 17,2 %, l’imposition globale s’élève à 30 %.
Le PFU est assis sur le montant des plus-values après imputation des éventuelles moins-values et de l’abattement fixe pour les dirigeants partant à la retraite. Contrairement à l’imposition au barème de l’IR, il n’est pas tenu compte des abattements pour durée de détention.
Cas particulier de l’assurance-vie
Tableaux schématiques de l’imposition des produits d’un contrat d’assurance-vie perçus à compter du 1er janvier 2018
Plus-values de cessions de valeurs mobilières
Précisions sur l’imputation des moins-values
Les moins-values subies au cours d’une année sont imputées impérativement sur les plus-values de même nature imposables au titre de la même année, avant application des abattements pour durée de détention ou de l’abattement fixe pour les dirigeants partant à la retraite.
- En cas de solde positif, les plus-values subsistantes sont réduites, le cas échéant, des moins-values de même nature subies au cours des années antérieures, jusqu’à la dixième inclusivement, puis des abattements pour durée de détention ou de l’abattement fixe pour les dirigeants partant à la retraite ;
- En cas de solde négatif, l’excédent de moins-value non imputé est reporté et est imputé dans les mêmes conditions au titre des années suivantes jusqu’à la dixième inclusivement.
Sort des différents abattements
Abattements supprimés
Pour les plus-values réalisées à compter du 1er janvier 2018, sont supprimés, y compris en cas d’option pour l’imposition au barème progressif de l’IR :
- L’abattement proportionnel pour durée de détention renforcé applicable aux cessions des participations supérieures à 25 % à l’intérieur du groupe familial, y compris pour les titres acquis avant le 1er janvier 2018 ;
- L’abattement proportionnel pour durée de détention renforcé applicable, sous conditions, aux cessions de titres de sociétés soumises à l’IS par des dirigeants partant en retraite, y compris pour les titres acquis avant le 1er janvier 2018.
Abattements maintenus sous conditions
Sont maintenus, pour les plus-values de cession de titres acquis avant le 1er janvier 2018 :
- L’abattement de droit commun pour durée de détention ;
- L’abattement renforcé pour les titres de PME de moins de dix ans.
Ces abattements ne sont applicables qu’en cas d’option pour l’imposition globale au barème progressif.
A noter : pour l’abattement renforcé applicable aux plus-values de cession de titres de PME de moins de dix ans, les activités commerciales éligibles sont définies par référence aux articles 34 et 35 du CGI (activités commerciales par nature ou par détermination de la loi).
Nouvel abattement fixe pour les dirigeants partant à la retraite
Un nouvel abattement fixe de 500 000 € applicable aux plus-values de cession de titres réalisées par les dirigeants partant à la retraite est mis en place. Il se substitue au dispositif préexistant dont l’extinction était fixée au 31 décembre 2017.
Ce nouveau dispositif s’applique aux cessions et rachats réalisés du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022.
Cet abattement fixe est applicable quelles que soient les modalités d’imposition des plus-values (PFU ou barème progressif).
Pour l’essentiel, les conditions d’application de cet abattement sont reprises de l’ancien dispositif de l’article 150-0 D ter du CGI. Cependant, il existe de légères différences.
Il faut ainsi notamment noter que :
- cet abattement n’est pas cumulable avec les abattements proportionnels qui ont été maintenus ;
- cet abattement est réservé aux titres détenus depuis au moins un an à la date de la cession.
Tableau récapitulatif des abattements applicables à compter du 1er janvier 2018
Plus-values immobilières : abattement exceptionnel en cas de cession en vue de la construction de logements en zones tendues
Un abattement exceptionnel de 70 % (ou 85 % sous certaines conditions) s’applique sur les plus-values de cession de terrains à bâtir ou de biens bâtis destinés à être démolis, situés en zone tendue, à condition que :
- la cession soit précédée d’une promesse de vente ayant acquis date certaine entre le 01/01/2018 et le 31/12/2020 et qu’elle soit réalisée au plus tard le 31/12 de la 2ème année suivant celle au cours de laquelle la promesse a acquis date certaine ;
- le cessionnaire s’engage, dans l’acte d’acquisition, à réaliser et à achever, dans un délai de 4 ans à compter de la date d’acquisition, un ou plusieurs bâtiments d’habitation collectifs dont le gabarit est au moins égal à 75 % du gabarit maximal autorisé, ainsi qu’à démolir les constructions existantes, le cas échéant.
En cas de non-respect de cet engagement, le cessionnaire est redevable d’une amende d’un montant égal à 10 % du prix de cession.
Cet abattement ne s’applique pas en cas de cessions réalisées au profit :
- du conjoint, partenaire ou concubin notoire du cédant ou d’un ascendant ou descendant du cédant ou de l’une de ces personnes ;
- d’une personne morale dont le cédant ou l’une des personnes mentionnées ci-avant est un associé ou le devient à l’occasion de cette cession.
Cet abattement exceptionnel s’applique pour la détermination de l’assiette de l’IR et des prélèvements sociaux, après prise en compte de l’abattement pour durée de détention.
A noter également :
- Augmentation de la CSG sur les revenus d’activités et les revenus du patrimoine
- Revalorisation des tranches du barème de l’IR et de certains seuils, plafonds et abattements
- Aménagement du régime « Monuments historiques »
- Prorogation du dispositif « Censi-Bouvard »
- Prorogation et aménagement du Crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE)
- Aménagement de la réduction d’impôt « Madelin » ou « IR-PME »
- Report de la réforme du prélèvement à la source au 1er janvier 2019
- Prorogation de l’exonération en cas de cession d’un immeuble destiné au logement social
Fiscalité des entreprises
Plus-value de cession à long terme des entreprises à l’IR
Afin de s’aligner sur le taux de la « flat tax » applicable aux plus-values de cession de valeurs mobilières des particuliers, le taux d’imposition des plus-values nettes à long terme réalisées par les entreprises relevant de l’IR est abaissé de 16 à 12,8 %.
Compte-tenu des prélèvements sociaux applicables au taux de 17,2 %, le taux global d’imposition s’élèvera donc à 30 %.
Augmentation des seuils des régimes « Micro BIC » et « Micro BNC »
Le régime « micro BIC » s’applique désormais en année N aux contribuables dont le chiffre d’affaires HT n’excède pas en N-1 ou N-2 :
- 170 000 € pour les activités de vente de marchandises et de denrées et les activités de fourniture d’un logement (à l’exclusion de la location meublée autre que les meublés de tourisme et les chambres d’hôtes) ;
- 70 000 € pour les activités de prestations de service.
Le régime « micro BNC » s’applique en année N aux contribuables dont les recettes HT n’excèdent pas, en N-1 ou N-2, 70 000€.
Ces seuils seront réactualisés tous les trois ans dans la même proportion que l’évolution triennale de la première tranche du barème de l’IR et arrondis à la centaine d’euros la plus proche.
Le relèvement de ces seuils de chiffre d’affaires et de recettes s’applique également aux régimes du « micro social » et de l’auto-entrepreneur qui font référence à ces seuils.
Le régime de la franchise en base de TVA reste, quant à lui, inchangé. Les régimes « Micro BIC » et « Micro BNC » sont donc déconnectés du régime de la franchise en base de TVA.
Cette mesure est applicable à compter de l’imposition des revenus de l’année 2017.
Un délai supplémentaire d’option pour un régime réel d’imposition est par conséquent accordé aux entreprises industrielles et commerciales qui relevaient de plein droit d’un tel régime au titre de 2017 selon les règles anciennes. Ces entreprises doivent exercer l’option pour un régime réel d’imposition dans le délai de dépôt de a déclaration n°2031-SD, i.e. au plus tard le 3 mai 2018.
Modification du taux de l’IS
La réforme du taux de l’IS instaurée par la loi de finances pour 2017 est aménagée pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019.
Taux d’impôt sur les sociétés en fonction de la taille de l’entreprise et des bénéfices réalisés :
A noter également :
- Suppression du CICE à compter du 1er janvier 2019
- Aménagement du dispositif d’encadrement de la déductibilité des charges financières afférentes à l’acquisition de certains titres de participation
- Suppression de la contribution de 3 % sur les revenus distribués à compter du 1er janvier 2018
- Aménagements des régimes de faveur relatifs aux opérations de restructuration (fusion, apport partiel d’actifs, etc.) : transposition de la clause anti-abus de la directive fusions, création d’une nouvelle procédure de rescrit, assouplissement du régime des apports partiels d’actif et des scissions, etc.
- Instauration de différés d’imposition pour certaines opérations (notamment sursis d’imposition pour les opérations de regroupement ou division d’actions et de conversions d’actions en certificats mutualistes ou paritaires, report d’imposition des plus-values résultant d’un échange de terres entre Safer et sociétés)
- Régime spécial des cessions de locaux professionnels destinés à être transformés en logement (CGI, art. 210 F)