Le succès des sociétés civiles est indéniable. Il en existerait déjà près de 1 million et le nombre de créations chaque année est significatif (85.000 pour l’année 2016, soit 20 % des immatriculations, selon les statistiques du registre du commerce et des sociétés). Quelle est la raison d’un tel engouement ?
Certainement la souplesse juridique (grande liberté dans la rédaction des statuts) et fiscale (translucidité ou option à l’impôt sur les sociétés) attachée à cette forme de société, qui en fait un outil incontournable de la gestion de patrimoine. Il est vrai que la société civile offre souvent une réponse adaptée aux objectifs poursuivis : transmettre un patrimoine en retenant les pouvoirs et les revenus, organiser la gestion des biens d’une personne vulnérable, se prémunir contre la prodigalité d’un enfant ou son incapacité à gérer un patrimoine complexe… Lorsqu’elle a pour objet l’acquisition et la gestion de biens immobiliers, elle prend le titre de société civile immobilière (SCI). Elle permet alors de structurer l’acquisition et la détention d’une résidence secondaire, d’un immeuble locatif ou encore de séparer l’immobilier professionnel de la société d’exploitation.
Les SCI doivent-elles tenir une comptabilité ? Oui, dans certaines situations. Ainsi une SCI assujettie à la TVA (TVA sur les loyers d’un local commercial…) a l’obligation d’établir des comptes. De manière plus rigoureuse encore, une SCI soumise à l’impôt sur les sociétés (IS), ou une SCI translucide ayant un ou plusieurs associés soumis à l’IS, doit tenir une comptabilité de type commercial (comptabilité en partie double, comptes annuels en forme de bilan, compte de résultat et annexe, principe de prudence impliquant d’amortir et de provisionner…). En dehors de ces principaux cas, il règne une forme de liberté, le gérant devant seulement rendre compte de sa gestion aux associés annuellement par un rapport écrit sur l’activité de la société, comportant l’indication des bénéfices et des pertes.
Fixer les droits respectifs des associés
Dès lors, pourquoi tenir une comptabilité dans une SCI lorsqu’elle n’est pas obligatoire ? Les arguments qui militent en faveur de la tenue d’une comptabilité sont nombreux. Pour l’essentiel, la comptabilité :
- permet au gérant de satisfaire au mieux son obligation de reddition annuelle des comptes ;
- fixe les droits respectifs des associés (détermination du résultat au terme de l’exercice, suivi des avances financières faites par chacun, répartition du boni de liquidation…) ;
- est utile en cas de cession ou de donation des parts (fixation de la valeur, information des parties, calcul de la plus-value et des droits de mutation…) ;
- permet de justifier à l’administration le contenu de la déclaration annuelle n° 2072, relative aux revenus de la SCI non soumise à l’IS ;
- écarte, avec d’autres éléments, le grief de fictivité de la société ;
- optimise la transmission en menant une politique comptable sur mesure : choix entre l’amortissement ou non de l’immeuble, la distribution ou la mise en réserve du résultat…Bref, le lecteur l’aura compris : lorsqu’elle n’est pas obligatoire, la tenue d’une comptabilité dans une SCI est vivement conseillée !
Alexandre BOUFFLERS
Notaire à Rennes, membre du Groupe Monassier
Article paru dans Les Echos le 2 juin 2017
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