En matière de transmission d’entreprise, les vertus fiscales de l’anticipation sont bien réelles. Il suffit pour s’en convaincre d’en rappeler quelques exemples.
Anticiper une donation
– Le pacte Dutreil
Il permet de pratiquer un abattement de 75 % sur l’assiette des droits de donation. En contrepartie, un engagement de conservation des titres de l’entreprise doit être respecté (engagement collectif d’au moins deux ans, puis engagement individuel pris par les donataires de quatre ans minimum).
Cet engagement est contraignant pour l’entreprise (et ses associés) puisqu’il empêche, pendant toute sa durée, un grand nombre d’opérations de restructuration et de reconfiguration du capital social. Il faut donc établir ce pacte Dutreil le plus tôt possible.
En effet, l’engagement collectif doit être en cours au jour de la donation, mais l’engagement individuel des repreneurs ne débute qu’à l’issue de celui-ci. De sorte que, si le pacte a été signé trop peu de temps avant la donation, les donataires seront tenus à un engagement global pouvant atteindre six ans (2+4 ans). Cet écueil sera évité par la signature du pacte au moins deux ans avant la donation, permettant ainsi à la phase d’engagement individuel de courir dès la donation.
– La société holding animatrice
L’absence d’une définition précise de la société holding animatrice est source d’une grande insécurité. Nous ne reviendrons pas sur ce sujet déjà très commenté (1). Rappelons simplement que le caractère « animateur » de la société holding doit être effectif au moment de la transmission. Or, la constitution des preuves de l’animation (mise en oeuvre d’une convention d’animation, procès-verbaux d’assemblées d’associés, réunion de conseils et comités…) suppose l’écoulement d’au moins un ou deux exercices. Le statut de « holding animatrice » requiert donc un minimum de préparation.
Anticiper une cession… et le réinvestissement du produit de l’opération
Le chef d’entreprise peut souhaiter réinvestir le prix de cession de ses titres dans des placements « non professionnels » (immobilier, placements financiers…) et gérer ces placements par le biais d’un holding patrimonial soumis à l’impôt sur les sociétés.
S’il est prévoyant, le chef d’entreprise pourra apporter ses titres en holding, avant que le holding ne procède à la cession des titres qu’il a ainsi reçus en apport. Si toutes les conditions légales (2) sont réunies et si, notamment, la cession intervient au plus tôt trois ans après l’apport, la plus-value d’apport sera placée en report d’imposition (jusqu’au jour où les titres du holding seront eux-mêmes cédés).
Quant à la plus-value de cession des titres apportés, elle pourra être imposée au taux effectif de 4 % auprès du holding (3).
De telles dispositions permettront au chef d’entreprise de limiter significativement le coût fiscal de la cession et d’augmenter ainsi sa capacité de réinvestissement.
(1) « Quelle définition pour la société holding animatrice », Nicolas Dupouy, « Les Echos Patrimoine » du 15 avril 2016.
(2) Fixées par l’article 150-0 B ter du Code général des impôts. Le report d’imposition de la plus-value prend fin si le holding cède les titres dans les trois ans de l’apport.
(3) Si les conditions du régime « mère-fille » sont réunies
Olivier GIACOMINI
Collaborateur au sein de l’office Monassier & Associés, Notaires à Paris
Article paru dans Les Echos le 9 juin 2017
Lire l’article sur le site www.lesechos.fr